Vous habitez dans la banlieue Sud de Beyrouth, au Liban.
Ce matin, vous avez lu (ou quelqu'un de votre famille, vos voisins, vos amis ont lu) un "tweet" venu du compte X de Avichay ADRAEE, si vous êtes arabophone, ou de Olivier RAFOWICZ si vous êtes francophone.
Vous êtes abonné à ce compte X (ex-twitter) parce que votre vie peut en dépendre.
Ces deux commentateurs annoncent précisément les bombardement de l'armée Israélienne Tsahal, dont ils sont porte-parole "grand public." Tous deux ont le grade de colonel ( Alouf mishne אלוף משנה (אל"מ) (Alam)) קצינים בכירים dans les forces de défense d'Israël.
Des raids israéliens sur la banlieue sud de Beyrouth.
Photo de Hossam SHABARO publiée dans An Nahar (النهار) Le Jour, ce samedi 16 novembre 2024.
Ce matin, "ils ont dit" que c'est votre immeuble, votre maison, qui vont être bombardés et "qu'il faut vous en aller."
Vous avez pris à toute vitesse les bagages que vous aviez préparé "au cas ou", ou bien vous avez fait votre valise avec l'angoisse de la mort qui vous tord les tripes, au point que le cœur a du mal à suivre.
Certains en meurent d'un arrêt cardiaque, tout simplement, de suite.
Vous aviez un toit. Vous l'avez toujours, mais vous savez que cette nuit vous ne l'aurez plus.
Si vous restez, vous êtes mort.
Alors, bien sûr vous partez, vous ne restez pas.
Vous n'allez pas forcément très loin, car vous n'avez nulle part où aller.
La famille en premier, les amis pas trop, les autorités dépassées et les abris bondés, la rue le plus souvent, voilà ce qui vous reste.
"L'ennemi israélien" a estimé que votre immeuble était trop proche du Hezbollah, du mouvement Amal, ou servait au Hezbollah.
Vous avez de la chance.
Si un chef du Hezbollah habitait dans votre immeuble, vous n'auriez peut-être même pas été prévenu par Twitter.
De loin, pas forcément très loin, vous entendez des sifflements. Puis les explosions.
Vous êtes parti, bien sûr, vous n'avez pas attendu la mort.
De là où vous êtes, vous voyez votre immeuble, votre maison, votre vie passée, vos souvenirs, exploser et partir en éclats de fumée.
Un raid israélien sur la banlieue sud de Beyrouth. Photo de Hossam SHABARO parue dans le quotidien libanais An Nahar (النهار) "Le jour."
"Une image vaut mille mots", disait le philosophe CONFUCIUS ( -551 - -479 avant J-C ) mais si je vous avais simplement montré cette image prise ce matin dans An-Nahar, quotidien libanais, qu'auriez-vous vu?
Vous auriez vu une énième image de guerre, dont au fond vous ne vous préoccupez que très peu.
C'est loin. "C'est pas chez nous."
C'est pourquoi j'ai voulu vous raconter, un peu, l'histoire la plus proche du réel de ces gens dont vous voyez la tête au bas de l'image en pièce jointe.
Vous comprenez mieux la précision des tirs, et le désespoir des cibles.
Avec les moyens militaires aériens que les États-Unis d'Amérique consentent à Israël, avec le peu de moyens que l'armée libanaise peut avoir, c'est presque à coup sûr, à 100 pour 100 d'efficacité, que les destructions ciblées ordonnées par l'armée d'Israël se font.
Ayez, s'il-vous-plait une pensée pour ces civils libanais qui voient s'effondrer leur vie passée avec autant d'angoisse que de colère.
Ayez-en une autre, quand vous penserez à l'armée française.
Ayez-en une autre, quand on vous dira que les avions Rafale "coûtent cher et ne servent à rien."
Ayez en une autre, quand on ricanera devant vous sur nos missiles Crotale, Roland, Mistral... Tous nos moyens anti-aériens.
Clip Israëlien de Tsahal sur You Tube: https://youtu.be/c7S6IoeeJsQ?si=960QX3qn90Begg6r
Avec une pensée pour nos forces nucléaires.
Vous savez ? Les "bombinettes" dont on rigole au bistrot.
Celles auxquelles l'Ukraine avait renoncé, avec le "succès pacifique" et les conséquences dramatiques que l'on sait ensuite.
Nous en France, on a tout ça et on le paie (cher) dans nos impôts.
Mais nous, nous n'avons pas les avions d'un pays voisin qui peuvent bombarder nos villes ou envahir nos champs quand ça leur chante.
C'est vrai, en Europe, ce sont des pays voisins... Ils nous aiment tous.
La Russie aussi est un pays voisin de l'Ukraine; et Moscou n'a jamais cessé de répéter que Kiev est une magnifique part de leur belle histoire.
L'assurance ne coûte cher qu'avant l'accident.
En attendant, si vous étiez en bas de la photo en train de voir votre immeuble détruit, vous seriez en train de chercher un toit en quelques heures pour la nuit prochaine...
La rage au cœur.
En remerciant le Hezbollah, milice Chiite armée à la solde de l'Iran, de vous avoir mis à la rue à cause de sa haine des Juifs.
Quand je dis en remerciant, c'est au second degré.
Il ne faut pas mélanger les assassins du Hezbollah qui sévissent depuis l'assassinat en 1983 de 58 parachutistes français à Beyrouth dans l'immeuble Drakkar où ils dormaient, avec l'ensemble des Musulmans Chiites du Liban, comme le dit Samy GEMAYEL; car ce serait une erreur grave; comme le dit aussi et encore ce matin un article signé Mounir YOUNES à la "une" de "L'Orient - Le Jour" à Beyrouth.
Pensez-y aux prochaines élections quand vous réaliserez que le Hezbollah, ainsi que le Mouvement Amal, est devenu un parti politique qui bloque la vie d'un pays.
Ce qui se passe au Liban, peut arriver dans tous les pays humanistes béats du Monde; dont la France peut elle aussi faire partie.
Bon dimanche. Bon weekend.
Vous n'habitez pas au Liban ?
Courage aux civils et militaires libanais.
Merci au quotidien "An-Nahar" (Le Jour) pour les photos souvent remarquables qui illustrent le journal.
Merci au quotidien "L'Orient - Le Jour", inégalé en français, dont je suis et reste abonné.
Sans oublier celles et ceux dont je lis attentivement les lignes, comme Caroline HAYEK, Émilie SUEUR, Fifi ABOU DIB, Marie-Lina HRAOUI, Stéphanie KHOURY, Anthony SAMRANI, Cordon COURTINE, Elias HANKACH, Issa GORAIEB, Joseph AOUN, Khalil HÉLOU, Samy GEMAYEL, entre autres...
Bises aux dames, en premier celle qui voit les bombes tomber sur Beyrouth, et qui dine devant sa télé ce soir; à qui je souhaite "tout le bonheur du monde".
Salut aux messieurs, en premier Claude EL KHAL qui me permet - parfois - de citer ses articles, car c'est un pur journaliste, même s'il y combat ouvertement Israël.
Didier CODANI
A Nice (France), ce samedi 16 novembre 2024 après-midi.
Dans la peine, avec mes amis, des deuils de la semaine.
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