Dans le tramway ce matin

Tramway de Nice, ce jour.

Pour les besoins de mon travail, quand je peux, je prends les transports en commun.

Je me retrouve donc ce matin dans une rame de tramway à Nice.

La ligne 2 du tramway de Nice (image d'illustration)

Pas loin de moi, je note d'un coup une dame de 35-40 ans avec une ado de 13-14 ans.

Mère et fille.

Tout est dans le regard.

La fille a peur. Sa mère la serre dans ses bras, pas rassurée, mais le regard dur.

On sent de suite qu'elle ne va pas se laisser faire.

Je suis le regard et je vois à proximité immédiate un homme "méditerranéen" au regard fou, illuminé, excité, braqué vers la fille de 13-14 ans.

Je me lève, je m'interpose entre la fille et lui, et je propose à la mère de changer de place avec moi pour que sa fille puisse s'assoir.

Elle me répond poliment que ce n'est pas nécessaire, que ce n'est pas un souci.

Que "ce n'est pas ça le souci". Nuance importante.

A coté d'elle une brave dame de 60-70 ans en boubou, abaya tradi - foulard sur la tête.

Elle me montre d'un doigt, discrètement, l'homme au regard excité en me disant à voix basse : "Regard pas bien".

Je reviens vers la mère de famille, je sors mes papiers, je les lui montre, et je lui dis d'une voix claire et neutre:

"Vous n'êtes pas seule, Madame."

Je retourne m'assoir, et je regarde l'excité. Son regard devient fuyant.

Le tram arrive immédiatement après en station et s'arrête. L'homme sort tout de suite se perdre dans la foule.

Ce n'est que plus tard, quand la population du compartiment aura changé que la dame me proposera de m'assoir avec elle et sa fille.

Pour me dire merci, en premier.

Pour me faire comprendre que oui, elle avait bien le sentiment que sa fille était sur le point de se faire agresser / violer devant elle, et que personne n'allait réagir si cela survenait.

Dire aussi à quel point, les papiers et "Vous n'êtes pas seule, Madame" cela avait changé la situation pour elle.

Cette femme n'est en rien une extrémiste, ou une raciste politisée. Nous avons un peu dialogué.

C'est tout bêtement une mère de famille qui était prête à se battre jusqu'à la mort si nécessaire pour défendre son enfant.

Sans espérer le moindre secours de quiconque. En France, en 2025, en milieu de matinée, un jour de semaine.

On croit rêver...

Je ne crois pas que la présentation de mes papiers à l'excité aurait changé quoi que ce soit à la suite de l'histoire.

En revanche, "Vous n'êtes pas seule, Madame"; cela change tout. Il n'était pas sourd.

"Quand les types de 130 kilos disent certaines choses, les types de 60 kilos les écoutent..." écrivait Michel AUDIARD.

Le violeur / agresseur potentiel a compris que ce ne serait pas si facile.

Il est parti.

Le problème, c'est qu'il existe, et qu'il reviendra.

Il y en a combien des gens comme lui qui rôdent dans l'espace public, à toute heure du jour ou de la nuit ?

Je n'ai pas de chiffres, pas de statistiques immédiatement disponibles.

Tout ce que je peux dire, c'est que tant qu'il y aura quelqu'un en face pour montrer clairement et sans surenchère qu'il ne restera pas passif, l'agresseur potentiel y réfléchira à deux fois avant de passer (ou pas) à l'acte.

Il n'y a rien de plus ou de mieux à faire.

Un regard appuyé sur une mineure - même visiblement malsain - n'est ni un crime ni un délit.

Il faut juste, au moins, sans forcément insister, penser à dire clairement:

"Vous n'êtes pas seule, Madame".

Nous vivons une époque formidable...

Et notez que je dois être à 95 kilos (ce qui est déjà bien) et pas à 130 kilos.

;-)

Bises aux dames, en premier celles qui sont prêtes à se battre pour défendre leur fille.

Salut aux messieurs, ceux qui auront bien voulu me lire jusque là et garder en mémoire ensuite.

Didier CODANI

A Nice, ce jeudi 26 juin 2025, en pause déjeuner.